Le CCNC prend en charge le cas
En 1979, des Sino-canadiens de partout au pays se sont unis pour protester contre le journalisme irresponsable de l’émission W5 de la chaîne CTV dans le cadre d’un épisodetitré « Campus Giveaway » (« Des campus donnés en cadeau »). Comme résultat de cette protestation, CTV a présenté des excuses publiquement pour les connotations racistes et les inexactitudes de cet épisode particulier. Les participants à cette action contre W5, dans des villes partout au Canada, se sont rassemblés pour tenir une conférence à Toronto. Suite à cette rencontre, le Conseil National des Canadiens Chinois (connu sous le sigle en anglais CCNC) a été formé en vue de promouvoir le droit à l’égalité pour tous les Sino-canadiens.
En 1987, le CCNC a fait une priorité de l’obtention d’excuses et de la réparation pour la Taxe d’entrée, alors qu’on se préparait pour une élection fédérale devant avoir lieu l’année suivante. Plus de 4,000 personnes ayant payé la taxe d’entrée, leurs épouses et descendants ont confié au CCNC de les représenter dans la recherche d’excuses et d’une réparation financière. De manière significative, le CCNC a travaillé avec la National Association of Japanese Canadians (Association nationale des Canadiens japonais), qui avait négocié un règlement avec le Gouvernement canadien en 1988 autour de l’internement des Canadiens japonais pendant la Deuxième guerre mondiale. Entre autres, le règlement contenait une reconnaissance, par le gouvernement, de l’injustice infligée aux Canadiens japonais, un paiement de 21,000$ à chaque survivant, 12,000,000$ à la communauté canadienne japonaise et 24,000,000$ pour créer la Fondation canadienne des relations raciales.
Un règlement n’a pas été à la portée des Sino-canadiens. Le CCNC s’est battu au cours du terme de plusieurs gouvernements,travaillant pour maintenir les politiciens informés au sujet de la question, organisant de nombreuses réunions communautaires, ralliant le support d’autres groupes et de Canadiens proéminents, sensibilisant davantage les médias et effectuant des recherches, et rencontrant plusieurs Ministres du Multiculturalisme pour parler de la question, etc. Mais, entre-temps, la communauté perdait ses survivants ayant payé la taxe d’entrée et leurs épouses.
Le début des années 1990 a vuun déplacement de la campagne vers le travail de la B.C. Coalition of Head Tax Payers, Spouses and Descendants(Coalition des personnes ayant payé la Taxe d’entrée, leurs épouses et descendants de la Colombie-Britannique). Ce groupe de base a recruté plus de 1,500 nouvelles personnes demandant la réparation pour la Taxe d’entrée, en soutien au CCNC et à ses efforts pour la réparation. Un nombre important de très grandes réunions communautaires a été réalisé pour maintenir la pression sur le Gouvernement et le feu des projecteurs sur la campagne pour la réparation.
Avant l’élection fédérale de 1993, l’ex Premier ministre Mulroney a tenté de régler les demandes de réparation soulevées par plusieurs communautés ethnoculturelles en offrant des médaillons individuels, une aile d’un musée et d’autres mesures collectives. Cela a été rejeté sans équivoque par les regroupements nationaux des Chinois, Italiens et Ukrainiens.
En décembre 1994, la Ministre du Multiculturalisme de l’époque, Sheila Finestone, a annoncé au Parlement que le gouvernement n’offrirait une réparation ni pour la Taxe d’entrée ni pour d’autres injustices historiques ayant affecté d’autres communautés.Malgré ce revers, les gens qui cherchaient la réparation ont continué à soulever la question à chaque fois qu’ils le pouvaient, y compris par l’entremise d’une soumission à la Commission des droits de l’homme des Nations Unies. Une autre décennie s’est écoulée avant que la communauté ne fasse des progrès significatifs.
Le cas se retrouve devant la Cour suprême
Alors que le processus politique stagnait, le CCNC et ses alliés, notamment la Metro Toronto Chinese & Southeast Legal Clinic (Clinique juridique chinoise et sud-est-asiatique du Toronto métropolitain), se sont tournés vers les tribunaux canadiens pour chercher la justice. En 1999, les plaignants M. Mack, Mme Quen Ying Lee et son fils Yew Lee ont déposé un recours collectif, appuyant certains aspects de leur argumentaire sur les garanties d’égalité devant la loi consacrées par l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.Dans une décision publiée en 2001, le juge Cumming de la Cour supérieure de l’Ontario a déclaré qu’il n’y avait « pas de cause raisonnable pour agir » et il a rejeté le cas. Le raisonnement du juge était que la Loi de l’immigration chinoise (1923) et ses amendements, qui avaient créé la taxe d’entrée et les lois d’exclusion, avaient été abrogées en 1947. Le juge Cumming a décidé, cependant, que la Chartene pouvait pas être appliquée rétroactivement ou rétrospectivement. La Cour d’appel de l’Ontario a confirmé la décision du juge Cumming le 13 septembre 2002.
Le 18 novembre 2002, une fois de plus, les tribunaux du Canada n’ont pas amené la justice aux Canadiens d’origine chinoise pour la Taxe d’entrée et pour la Loi d’exclusion, alors que la Cour suprême du Canada rejetait une demande d’autorisation d’interjeter appel déposée par M. Shack Jang Mack en lien avec le recours collectif contre le Gouvernement du Canada.
De conformité avec ses pratiques générales, le tribunal le plus haut du pays n’a pas donné des raisons pour le rejet de Mack v. Canada(2002). Il n’a pas eu un mot à dire à l’endroit de M. Mack, le plaignant principal dans le cas, qui était décédé seulement quelques semaines avant le rejet, sans avoir jamais vu la justice arriver.